Des pèlerins motards à la calèche, la genèse captivante d'un chemin marial en cours de création

Lourdes, Pontmain, Pellevoisin, la chapelle de la rue du Bac et La Salette: qu'ont en commun ces cinq lieux? « Ce sont tous des sanctuaires où la Vierge Marie est apparue au XIXe siècle, en 46 ans. Des hauts lieux inspirants! », répondent d'une seule voix Jean-Marie Frécon et Manu Martin qui, en 2015, ont relié ces lieux à moto en dessinant la lettre « M » sur la terre de France. M comme Marie, leur passion commune… en dehors de la Harley-Davidson! Ils ont ainsi effectué 3500 kilomètres en 15 jours, à travers 20 départements. Avec, pour unique soutien logistique, la Providence. En effet, la quasi-totalité du budget de leur pèlerinage a servi à acheter de l'essence pour leurs motos. Pour le reste… à la grâce de Dieu, de Marie, et des rencontres au fil de la route!

« Nous nous sommes retrouvés face à nous-mêmes, commentent-ils. Et puis, nous avons découvert le message de Marie. L'amour, tout d'abord: s'aimer, et aimer l'autre pleinement. La simplicité, ensuite, à l'exemple des personnes auxquelles Marie est apparue! Nous voulons à présent transmettre ce message. » Pour ce faire, les deux amis ont immortalisé leur formidable aventure dans un film, qui a bouleversé de nombreux spectateurs.

De la moto au vélo...

Comme ils le souhaitaient, ces pèlerins motards firent des émules. Au retour des JMJ de Cracovie, en 2016, un groupe de jeunes voulut mettre en pratique les paroles qui y avaient été prononcées par le pape François: « Le temps qu'aujourd'hui nous vivons n'a pas besoin de jeunes-canapés, mais de jeunes avec des chaussures ; mieux encore, chaussant des crampons. Il n'accepte que des joueurs titulaires sur le terrain, il n'y a pas de place pour des remplaçants. Le monde d'aujourd'hui vous demande d'être des acteurs de l'histoire, parce que la vie est belle à condition que nous voulions la vivre. »

C'est ainsi que douze pèlerins-cyclistes, de 20 à 27 ans, effectuèrent à leur tour, durant l'été 2017, ce parcours, qu'ils rebaptisèrent le « Grand AIME » : soit 2300 kilomètres en 32 jours, avec une moyenne de 80 kilomètres par jour. « Cependant, précisent-ils, ce pèlerinage était avant tout une démarche spirituelle, et non un défi sportif, même s'il a impliqué un engagement physique réel. Comme Dieu passe par Marie pour se révéler et cheminer avec nous, nous devons passer par Marie, notre maman du Ciel, pour aller vers notre Père. » Quatre nouvelles éditions eurent lieu durant l'été 2018, du 14 juillet au 15 août, au départ de Lourdes, puis en 2019, 2020 et 2021.

Dans leur sillage, deux jeunes femmes, Louise et Adeline, s'apprêtent à refaire cet itinéraire en quatre voyages, le premier étant prévu du 6 au 21 juillet prochain, de Lourdes à Cholet (800 kilomètres). Leur motivation? « Nous voulons renforcer notre foi, répondent-elles, pour rayonner davantage. Et aussi prier pour la guérison d'une de nos amies, Rebecca. » Sur leur site, on peut aussi leur confier des intentions de prières.

...et à la calèche !

Pendant la pandémie de covid, un groupe d'amis, qui avait participé à l'organisation des Vierges pèlerines dans les années 1990, imagina d'effectuer sur ce trajet un pèlerinage collectif. Cette équipe, rejointe par de nombreux bénévoles et encouragée par une trentaine d'évêques, conçut un projet grandiose: réaliser un tour de France de 2000 kilomètres en 107 jours, traversant 25 diocèses, sur les pas de Marie.

Le 1er juin 2020, lorsque le déconfinement le permit, une calèche tirant une grande statue de Notre-Dame partit de Lourdes, alors qu'un attelage similaire quittait La Salette. En trois mois et demi, les deux calèches traversèrent les villes et villages de France, ainsi que ses deux plus grandes villes: Lyon, le 21 juin, avec un passage à Notre-Dame-de-Fourvière ; et Paris, du 12 au 15 août, en faisant halte à la chapelle de la Médaille miraculeuse de la rue du Bac, sur le parvis de Notre-Dame, puis à la basilique du Sacré-Cœur de Montmartre. Les deux calèches se rejoignirent le 12 septembre à Pellevoisin.

« Notre souhait, expliquent les organisateurs, était que Marie touche les cœurs de ceux que nous croiserions. Nous voulions aussi nous consacrer à elle, et lui confier l'avenir de notre pays. Enfin, un autre élément déclencheur avait été l'incendie de Notre-Dame: à travers cette cathédrale, c'était la grande histoire d'amour entre Marie et la France qui brûlait sous nos yeux, appelant à la reconstruction. »

Ce pèlerinage a réjoui les cœurs des 15 000 pèlerins qui y ont participé. « Je suis partie sans savoir où je dormirais ni ce que je mangerais le lendemain, témoigne Hélène, et je reviens en constatant que rien n'a été un souci: au contraire, les locaux sont d'une telle générosité que j'ai vécu deux journées dans l'abondance! »

Et Florence d'ajouter: « J'ai été marquée par les gens que nous croisions: une vieille dame à sa porte qui priait avec nous à notre passage, cette autre qui avait décoré de roses blanches en papier le tour de sa maison pour le passage de Marie, ces inconnus qui nous faisaient des gestes amicaux et nous souriaient. » Assurément, ce projet avait suscité un tel enthousiasme qu'il ne pouvait pas s'arrêter là.

Vers un itinéraire permanent

Au lendemain de ce pèlerinage, l'association a été contactée par de nombreuses personnes qui souhaitaient emprunter cet itinéraire marial, en partie ou en totalité, à pied ou à vélo. « Pour répondre à ces demandes, il fallait donc songer à préciser l'itinéraire et à le baliser, explique Aude-Claire Brocard, chargée de mission pour l'association. Nous avons donc eu l'idée d'implanter tous les 10 kilomètres des oratoires, sculptés sur le modèle de la statue de Marie qui avait été portée en calèche. » A ce jour, une quinzaine d'oratoires ont été installés, sur des lieux privés ou diocésains, et trente-cinq autres devraient être érigés d'ici un an.

Reste la question du balisage. « En 2020, poursuit Aude-Claire, la calèche était passée par des routes. Mais pour les marcheurs, il nous faut identifier un itinéraire qui emprunte en grande partie des chemins de randonnée. » C'est là une tâche de longue haleine! Le site internet du M de Marie propose donc, pour l'instant, un tracé GPX, en constante évolution.

Une carte interactive à créer ensemble

Chacun peut apporter sa pierre à la co-création de cet itinéraire en empruntant le tronçon de son choix, pour proposer des améliorations de son tracé.

Une opération d'envergure est également lancée le 26 mai prochain, à l'occasion de la fête des mères: « 2000 kilomètres en 2 heures! » Le concept? 200 équipes de pèlerins marcheront chacune 10 km pour aller d'un futur oratoire à un autre, en parcourant ainsi les 2000 kilomètres du chemin. Les inscriptions sont ouvertes, et chacun peut se joindre à cet événement en tant que responsable d'étape ou simple marcheur.

« Le jeu en vaut vraiment la chandelle, commente Aude-Claire. Avec le concours de tous, le Chemin du M pourra se déployer sur le territoire de France. Sur le modèle des chemins de Saint-Jacques-de-Compostelle! »